PARTIE 1 –
La crise sanitaire a mis les entreprises au pied du mur, cette fois, il faut vraiment y aller : tous les salariés dont le métier le permet doivent continuer leur activité en télétravail. Aujourd’hui, tout le monde s’accorde à dire que cela précipite une évolution qui était de toute façon inéluctable. Les collaborateurs sont séduits et les entreprises semblent prête à envisager une montée en puissance de long terme, parce que finalement, il y a un vrai potentiel de gain.
Alors si le télétravail s’installe dans le temps, allons-nous vivre au pays des gens heureux où tout le monde a gagné ? Pourquoi pas, encore faut-il ne pas oublier l’essentiel : les bénéfices du télétravail n’apparaissent pas par magie. Le confort, la qualité de vie au travail, la performance et l’efficacité des collaborateurs résultent d’une construction réfléchie qui a un coût. Alors que tout le monde a réussi à avancer vaille que vaille pendant le confinement, installer le télétravail comme composante de l’organisation de l’entreprise nécessite une vraie prise de conscience quant à l’investissement nécessaire.
Télétravail mon ami
Le recourt massif au télétravail a été imposé par les circonstances, pour autant, sa mise en place est devenue séduisante pour beaucoup. Et une fois que le sujet de la garde des enfants n’existera plus, les avantages apparaitront vraiment à plein.
Pour les collaborateurs, ce sont les tensions quotidiennes et l’organisation de vie qui ont été favorablement impactées :
- Avec la disparition des trajets travail-domicile, le gain en termes de temps, de fatigue et de stress est non négligeable, surtout quand le lieu de travail est éloigné ou dépendant d’une grande agglomération ;
- Le calme du domicile favorise la réflexion et la concentration, et les efforts pour produire sont donc moindre qu’au bureau, surtout si l’entreprise est organisée en open space ;
- Les horaires sont moins rigides et il y a plus de liberté individuelle dans l’organisation du temps ;
- Le travail peut être nomade, il est donc inutile de rester proche de l’entreprise ;
- Pour les salariés handicapés ou en difficultés de santé, le maintien dans l’emploi est facilité ;
- Et il y a le plaisir juvénile de la transgression en réalisant une réunion dans une posture professionnellement insolite.
Pour les entreprises, parfois réticentes, cette expérience a ouvert à d’autres sources de performance :
- L’efficacité individuelle augmente ;
- Moins de fatigue et une autre disponibilité du temps diminue l’absentéisme ;
- En faisant tomber les barrières géographiques, le potentiel de talents accessibles augmente et ouvre un nouveau champ des possibles ;
- Avec moins de collaborateurs présents en permanence, des gains sur l’immobilier sont envisageables et l’enjeu financier est majeur ;
- L’entreprise développe à la fois son attractivité et la fidélisation de ses collaborateurs en répondant aux attentes des salariés d’aujourd’hui ;
- Les risques d’accidents de trajets sont drastiquement réduits.
Mais peut-on s’arrêter là ?
Premières ombres au tableau pour les salariés
La crise sanitaire brouille les cartes. En temps normal, les enfants sont à l’école, la maison n’est pas pleine et les distractions sont pléthoriques. En temps normal, le salarié maîtrise les contours de son poste, ses objectifs et ce qui lui est techniquement possible de réaliser. Correction faite de ces éléments, les collaborateurs perçoivent tout de même quelques difficultés.
Ainsi l’organisation du temps se complique. Quand tout se passe dans un même espace, il est difficile de séparer l’univers privé du professionnel. Il n’y a pas de « gong de fin » d’activité. Il est alors facile de glisser dans un acrobatique mélange des genres où le lave-vaisselle est vidé pendant une conf-call ou des mails sont envoyés depuis le lit à 22h30.
Autre réalité, les logements ne peuvent pas tous accueillir un espace de travail bien défini. Et aussi confortable à l’usage que soit le lit, la table de la cuisine ou le canapé, sa vocation initiale n’est pas de répondre aux besoins d’une personne en activité professionnelle. Selon la Fédération française des masseurs-kinésithérapeutes rééducateurs (FFMKR) (1), leurs praticiens ont ainsi vu affluer des pathologies cervicales à la fin du confinement. Un symptôme parmi d’autres liés à de mauvaises postures de travail.
Loin de l’entreprise, les imprévus prennent aussi une tout autre proportion. Une défaillance technique, et la nervosité monte rapidement. Un mail mal compris ou une réunion à distance un peu compliquée, et le sentiment d’une certaine violence est exacerbée. Le support des collègues et la possibilité d’évacuer avec eux les tensions immédiates ne sont plus là. A ceci s’ajoute, les difficultés du salarié à sentir « L’air du temps » de l’entreprise. Le collaborateur peut avoir l’impression de naviguer dans son isolement.
Le télétravail est aussi un vrai défi managérial. Avant le confinement, 64% des managers (2) n’étaient déjà pas accompagnés dans cette démarche et les dernières circonstances particulières n’ont pas amélioré la situation. Peu de manager savent réellement faire. Et pourtant les collaborateurs ressentent plus que jamais le besoin d’être entendus, soutenus, guidés, et reconnus. Sans cela, la frustration peut être grande…
Vous pourrez consulter la suite de cet article dans notre prochaine parution cette semaine, patience … Elle abordera les investissements de l’entreprise.
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(1) Témoignage de Sébastien Guérard, président de la Fédération française des masseurs-kinésithérapeutes rééducateurs (FFMKR) dans le journal Le Monde du 22 juin 2020-
(2) Enquête CSA – Malakoff Humanis sur le télétravail – mars 2020